Pourquoi une loi sur la fin du ticket de caisse?
Prévue par la loi n°2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire (dite loi AGEC), l’arrêt de l’impression systématique du ticket de caisse (sauf exceptions prévues par la loi), poursuit plusieurs objectifs :
- Lutter contre le gaspillage des ressources naturelles : 30 milliards de tickets de caisse papiers et facturettes de carte bancaire sont imprimés chaque année, dont 12,5 milliards de tickets de caisse représentant à eux seuls 150 000 tonnes de papier (soit 25 millions d’arbres coupés, 18 milliards de litres d’eau consommés et 22 millions de baril de pétrole produits). Or la plupart finissent à la poubelle, parfois dès la sortie de la caisse, et de par leur taille et poids, ils sont difficilement recyclables ;
- Diminuer le contact de la population avec les substances dangereuses pour la santé : 90 % des tickets de caisse comportent des substances dangereuses pour la santé, notamment du bisphénol, reconnu par les autorités de santé pour être un perturbateur endocrinien.
Ainsi l’interdiction de l’impression systématique est destinée à protéger l’environnement et la santé des consommateurs.
La loi concerne les relations entre les professionnels et les consommateurs. Elle ne s'applique donc pas aux relations entre professionnels.
Par quoi le ticket de caisse papier est-il remplacé ?
La loi ne prévoit pas de remplacement ni de substitution au ticket de caisse papier.
Toutefois, le ticket de caisse ne disparait pas totalement pour autant. En effet, le professionnel est toujours tenu d’imprimer et de délivrer le ticket de caisse papier dans les cas suivants :
- Si le client en fait la demande lors de son paiement, le commerçant ne peut alors le lui refuser.
- Dans les cas spécifiquement prévus par la loi.
A titre facultatif, le commerçant peut proposer à ses clients de recevoir leur ticket de caisse sur un support dématérialisé, tel que, par exemple :
- Envoi par email;
- Envoi par SMS ;
- Récupération du ticket depuis une page Web par un QR Code à flasher avec son smartphone ;
- Stockage sur le compte fidélité du client accessible sur Internet ;
- Envoi du ticket directement dans l’application bancaire du client ;
- Kiosque en libre-service.
La dématérialisation du ticket de caisse n’est pas prévue par la loi et ne peut être rendue obligatoire ni être imposée aux clients à la place du ticket papier.
Le client reste libre de ne pas demander de ticket de caisse, que ce soit sous format papier ou par voie dématérialisée.
La mise à disposition du ticket de caisse par voie dématérialisée peut impliquer, dans certains cas, la communication par le client de certaines de ses données personnelles (adresse email, numéro de téléphone…) dont le traitement requiert le respect de la réglementation applicable en matière de protection des données personnelles (RGPD et loi Informatique et Libertés).
Quels tickets sont concernés par la suppression de l’impression systématique du ticket de caisse ?
En application de l’article L. 541-15-10, IV, 1° du Code de l’environnement, sont visés par l’interdiction de l’impression et la distribution systématique :
- Les tickets de caisse de tout montant émis dans les établissements recevant du public et les surfaces de vente ;
- Les tickets de carte bancaire ;
- Les tickets émis par des automates ;
- Les bons d’achats et les tickets sur les réductions de prix, les promotions.
Seuls les tickets remis aux clients sont concernés, les tickets commerçants n'entrent pas dans le champ d'application de ce dispositif.
Quels tickets ne sont pas concernés par l’interdiction de l’impression systématique ?
Le Code de l’environnement prévoit des exceptions à la fin du ticket de caisse :
- Les tickets de caisse relatifs à l’achat de biens durables listés à l’article D.211-6 du Code de la consommation (tels que appareils électroménagers, équipements informatiques, téléphones portables, etc.), car ils mentionnent l’existence et la durée de la garantie légale de conformité ;
- Les tickets de carte bancaire émis à la suite d’opérations de paiement par carte annulées ou n’ayant pas abouti, soumises à un régime de pré-autorisation (exemples : pompe à essence automatique, caution pour la location d’une voiture, réservation d’hôtel) ou faisant l’objet d’un crédit (tel que le remboursement d’un achat par carte ou le transfert de fonds crédit);
- Les tickets émis par des instruments de pesage dont le fonctionnement n’est pas automatisé (ex : pesée des fruits et légumes) ;
- Lorsque la réglementation impose la remise au consommateur d'un ticket (par exemple, pour certaines préparations médicales vendues en pharmacie, l’achat de viande ou de charcuterie à la boucherie, etc.) ou d'une note (ex: pour les prestations de service dont le montant est supérieur à 25 € TTC ou dans le secteur de l’hôtellerie et de la restauration) ;
- Les tickets émis par des automates dont la conservation et la présentation sont nécessaires pour bénéficier d'un produit ou d'un service et permettre, le cas échéant, le calcul du montant dû en contrepartie (ex : tickets de péage ou de parking).
Quelles sont les obligations du commerçant sur la suppression de l’impression systématique des tickets de caisse ?
Le commerçant est tenu de :
- Communiquer auprès des clients sur la fin de l’impression systématique du ticket papier. Il doit ainsi afficher cette information à tout endroit où s’effectue le paiement, à la caisse ou sur les automates. L’affichage doit être compréhensible et lisible.
- Imprimer et remettre le ticket de caisse papier lorsque le client le demande ;
- Imprimer et remettre le ticket de caisse papier dans les cas exigés par la loi, listés ci-avant.
- De conserver son ticket de caisse informatiquement.
En parallèle, le professionnel doit respecter les obligations imposées par le RGPD. En outre, le professionnel devra mettre en place un premier niveau d’information générale au moment du passage en caisse, indiquant l’identité du responsable du traitement et les objectifs poursuivis par la collecte des données (transmission du ticket de caisse ou éventuelle réutilisation des données à des fins de prospection commerciale).
Il devra également recueillir le consentement de ses clients avant de collecter et traiter des données à caractère personnel les concernant, telles que leurs coordonnées mail et téléphoniques, dans le respect du principe de minimisation des données. Le client doit également être en mesure de s’opposer à tout moment à l’utilisation ou la conservation de ses données personnelles (par exemple, un bouton de désinscription à chaque envoi de mail).
Quels sont les avantages de la fin de l’impression du ticket de caisse papier obligatoire ?
La fin de l’impression du ticket constitue un avantage pour les professionnels et pour les clients.
Les avantages pour le professionnel
La diminution d’utilisation des consommables tels que les rouleaux de papier thermique et les cartouches d’encre peuvent être source d’économies et permettre également de réduire son empreinte carbone.
Nous verrons plus loin que la digitalisation de l’activité peut être une opportunité de fidélisation des clients, sous réserve d’obtenir le consentement explicite des clients et de respecter les exigences du RGPD et de la loi Informatique et Libertés.
Les avantages pour les clients
Outre le fait de réduire le risque pour leur santé, les consommateurs peuvent tirer d’autres avantages de la suppression du ticket de caisse imprimé :
- Ils pourront disposer, si le commerçant le propose, d’un ticket sur un support numérique non dégradable et plus durable : il ne risque pas de s’effacer avec le temps.
- Pour les consommateurs concernés, il est plus simple de transmettre des justificatifs déjà dématérialisés dans le cadre de la déclaration de leurs frais professionnels pour se faire rembourser.
Quelles pourraient être les craintes des clients suite à la fin de l’impression systématique du ticket de caisse ?
Si certains consommateurs peuvent se montrer encore réticents face à la disparition progressive du ticket de caisse papier, c’est parce qu’ils craignent de :
- Ne pas pouvoir mettre en œuvre la garantie des produits qu’ils achètent ;
- Ne plus pouvoir vérifier le détail de leurs achats (risque de fraude), contrôler les erreurs de prix ou la bonne application des promotions lors de leur passage en caisse ;
- Ne plus pouvoir demander un remboursement ou un échange ;
- Ne plus pouvoir faire leur comptabilité manuellement ;
- Ne pas pouvoir prouver leur achat.
Autre crainte possible liée à la fin du ticket de caisse papier, elle pourrait accroître la fracture numérique entre ceux qui possèdent des équipements informatiques et savent s’en servir, et les autres.
Le ticket dématérialisé peut être une alternative rassurante au ticket papier pour les consommateurs qui vivent mal l’arrêt du papier ou qui ont peur de ne plus pouvoir contrôler leurs achats. Le ticket de caisse dématérialisé permettra aux commerçants d’instaurer une relation de confiance avec leurs clients.
La fin du ticket de caisse imprimé systématiquement peut être l’opportunité pour les commerçants de renforcer la communication avec leurs clients, d’améliorer leur connaissance sur leurs habitudes de consommation s’ils acceptent de recevoir d’autres communications commerciales et de développer l’activité des commerçants.
En effet, le ticket de caisse dématérialisé peut devenir un nouvel outil marketing ciblé permettant la mise en place d’un programme de fidélité des clients (envoi de coupons promotionnels, etc.), sous réserve que :
- Les clients concernés aient accepté de recevoir les offres commerciales, dans le respect des règles relatives à la prospection commerciale;
- Leurs données personnelles soient traitées conformément à la réglementation applicable en matière de protection des données personnelles.
A l’inverse, dès lors que la principale crainte des consommateurs est de recevoir des sollicitations commerciales non désirées en communiquant leurs coordonnées personnelles, le commerçant peut opter pour une solution qui n’implique pas la communication de données personnelles (ex : scan d’un QR code) et permettrait de rassurer les consommateurs qui souhaiteraient uniquement recevoir leur ticket par voie dématérialisée.
La suppression du ticket de caisse constitue aussi l’occasion de changer de caisse enregistreuse, de terminal de paiement ou de logiciel de caisse et de s’équiper d’une solution de caisse informatisée et personnalisée permettant d’obtenir, par exemple, des données sur le panier moyen, les tendances de consommation, le nombre de commandes annulées, l’envoi instantané d’un e-ticket, l’envoi de bons de réduction dématérialisés. À la clé, la possibilité d’identifier les forces et les faiblesses de leur activité pour apporter les corrections ou aménagements nécessaires.